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Le patrimoine religieux français de Rome dans la tourmente : mauvaise gestion, opacité, malversations…

Les visiteurs en seront pour leurs frais : l’église Saint-Louis-des-Français, à Rome, est en travaux, et la plupart de ses trésors ne sont pas visibles. Pour l’heure, seule la nef est accessible. Les deux bas-côtés ainsi que les dix chapelles latérales sont masqués au public par des bâches et des échafaudages, dissimulant notamment l’inestimable Cycle de Saint-Matthieu, du Caravage, devant lequel des centaines de milliers de curieux s’extasient chaque année. Décidés il y a quelques mois, les travaux doivent se terminer début décembre. Leur objectif : refaire l’ensemble de l’installation électrique hors d’âge ainsi que les éclairages de l’église, tout en mettant l’ensemble à l’abri des risques d’incendie.
Là est sans doute la conséquence la plus visible, et la plus immédiate, du passage à Rome des magistrats de la Cour des comptes, qui ont rendu, le 3 septembre, un rapport détaillé accablant sur la gestion des Pieux Etablissements de la France à Rome et à Lorette, une institution propriétaire d’un patrimoine immobilier considérable, qui avait échappé jusque-là à tout contrôle malgré les innombrables alertes.
Résultat d’une accumulation de dons remontant pour certains au Moyen Age et institués en 1793 sous le patronage du cardinal de Bernis, ces actifs sont constitués de cinq églises situées dans le centre de Rome (Saint-Louis-des-Français, Saint-Yves-des-Bretons, Saint-Claude-des-Bourguignons, Saint-Nicolas-des-Lorrains et la Trinité-des-Monts). Mais les Pieux Etablissements sont également propriétaires de treize immeubles situés en plein centre de la capitale italienne, soit 180 biens immobiliers en location, bureaux, commerces et appartements – parmi lesquels le logement du correspondant du Monde à Rome –, dont la valeur marchande a été estimée, à la fin des années 2010, à 250 millions d’euros. Ils rapportent chaque année 4,5 millions d’euros de revenus qui permettent l’entretien des églises et de la communauté religieuse de Saint-Louis, et dégagent des excédents qui, au fil des années, ont fini par former un bas de laine non négligeable (plus de 20 millions d’euros).
L’ensemble, placé sous la tutelle de l’ambassade de France près le Saint-Siège, est dirigé par un administrateur (religieux) et un trésorier (laïque), aidés d’une « congrégation », où laïques et religieux sont à parité. Mais au fil du temps, il s’est mis à fonctionner hors de tout contrôle. Comment aurait-il pu en être autrement alors que les diplomates en poste à Rome ne sont là que pour trois ou quatre ans, quand certains administrateurs ou trésoriers restent en place plusieurs décennies ?
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